Ce
que tu subis n’est pas acceptable : brimades, insultes,
quolibets, crachats. Tous les jours, tu tournes dans les rues et
ruelles, à la recherche d’une pièce. Une pièce que te rapportera
quelqu’un qui abusera de ton corps sans vergogne. D’autres fois,
ces personnes en mal d’amour physique, frustré ou autre seront
doux, presque tendres, blessés à l’évidence dans leur désir non
exaucé qu’ils soient narcissiques ou autres.
Tu
n’es pas reconnue. Parfois, on te cache dans des lieux-dits de
massages, travestissant ta voix, dans des fourgonnettes puantes où
s’encrassent les remugles de ton activité.
Pas
de jugement.
Qui
tire les ficelles ? À qui accordes-tu ton pouvoir d’être en
ce monde ? Qui autorise tout cela ?
Je
ne me suis pas douté une seule minute de cela. Enfin peut-être que
si ! Je t’ai vu comme une femme, comme une autre, je savais
que tu souhaitais autre chose, même si je ne savais pas quoi.
J’imagine que notre rencontre n’était pas le fait du hasard,
synchronicité diluvienne et osmose garantie.
Je
n’ai pas la prétention de connaître ta vie. Prétendre t’apporter
la lune alors que je n’avais rien de cela, n’était pas dans mes
prérogatives non plus. Rien de ce que je te dirais, ne ferais
avancer quoi que ce soit. Les mots semblent vides de sens face à la
réalité que tu vis ici dans ce pays qui n’est pas le tien.
Oh
non, il n’y a pas de réels fautifs, de coupables, de vilaines
plaies d’Egypte derrière tout ce système d’esclavage sexuel
toléré.
Interdire,
c’est renier d’une part ton existence, et aussi ces bas instincts
plus particulièrement mâles. C’est se boucher les oreilles et les
yeux devant un fait de sexualité monnayée ou forcée, qu’on
prétend hypocritement punir – alors qu’on y participe
allégrement en refusant de le voir cette ombre.
Encadrer
tout cela n’encouragerait pas le vice : cela mettrait en
évidence que tu existes, tout en te permettant de quitter ce
tiroir-trottoir, cette case. Qui aura le courage dans ce pays et dans
ce monde de dire stop à toutes formes de tyrannies, de préjugés,
de violences psychologiques, sexuelles et verbales tolérées ?
Encadrer,
c’est tuer dans l’œuf toute tyrannie exercée à ton endroit.
Toute forme ou volonté de domination de ton corps, de ce que tu en
fais. C’est reconnaître qu’il existe une probabilité que tu
t’en sortes et aies droit à nouvelle vie, si tu le souhaites,
comme ce devrait être le cas pour tout à chacun.
Tu
es femme, avant d’être un orifice.
Tu
es mère, sœur, amante, fille, du monde.
Tu
es multiple et unique, rayonnante et obscure, sans commune mesure,
l’égale de l’homme.
Aucune
morale derrière ce message, un simple constat : tu existes, tu
n’es ni une honte, ni un objet, tu es.
Comme
celle qui se fait battre par un compagnon, qui dans l’attachement
forcé, se voit dépossédée de tout ce qu’elle est. N’accepte
plus cela, n’ait plus peur de dire non, de dire stop, de partir ;
l’Amour ce n’est pas cela. Que quelqu’un te blesse n’est pas
acceptable, que quelqu’un te maltraite ou t’insulte ne l’est
pas non plus, que l’on t’oblige au nom de la religion ne l’est
pas plus.
Néanmoins,
tu es libre de l’accepter, si cela te sied.
Nous
t’envoyons la flamme violette, pour qu’à ton tour, tu te
transformes, dans l’amour intérieur. C’est en toi que se cache
la clef de ton envol. En toi. Pas à l’extérieur. Rien de ce qu’on
pourra te faire ici bas n’atténuera ta lumière intérieure et ta
force de vie, d’âme et d’amour. Ce que tu es réellement est
sans limites, infini.
Ces
mots pourraient te paraître futiles, et tu as raison, surtout s’ils
sont écrits par quelqu’un qui ne partage rien de ton existence et
n’a aucun vécu de ce que tu vis. Vois au-delà de l’agressivité,
au-
delà
des sens et du jugement.
Où
que tu sois, où que tu vives, tu restes relié à ceux qui
t’entourent.
Et
non, les hommes ne sont pas tous ceci ou cela : ne les couvre
pas de pitié, d’excuses ou de haine ou de rejet. Passe ton
chemin : le chemin est la Vie.
Femme
de ce monde, tu te cherches et te questionnes sur ta nature.
Femme
de ce monde et de ces terres, ton éveil est en cours depuis
longtemps.